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Critères pour les consommateurs
Quand les disponibilités de riz sur le marché augmentent, le consommateur demande davantage du riz de qualité supérieure. Bien que l'évaluation organoleptique effectuée par des laboratoires et des groupements de consommateurs donne une certaine indication des critères importants pour la qualité du riz, elle ne reflète pas les propriétés pour lesquelles les consommateurs sont disposés à payer un supplément dans les magasins de détail. En identifiant clairement les qualités appréciées par les consommateurs, les sélectionneurs peuvent choisir pour cibles de leurs travaux d'amélioration les attributs qui sont économiquement viables. Les résultats pourraient fournir aux spécialistes des sciences sociales un ordre du jour pour les travaux des pouvoirs publics portant sur la commercialisation du riz, l'évaluation de la technologie et la fixation des priorités en matière de recherche.
La qualité du grain de riz traduit différentes propriétés pour divers groupes après récolte (Juliano et Duff, 1989). Bien que la variété de riz soit le principal facteur qui contribue à la qualité du grain, une manutention satisfaisante après récolte peut maintenir celle-ci, voire l'améliorer (tableau 19). La teneur en humidité est le critère de qualité le plus important pour le paddy. Le cultivateur entend par qualité du grain la qualité de la semence pour la plantation et la qualité du grain sec pour la consommation, avec un minimum d'humidité, de détérioration microbienne et de décomposition. L'usineur-négociant recherche une faible humidité, une intégrité variétale et un rendement élevé pour le riz total et le riz usiné. La qualité commerciale est principalement déterminée par les propriétés physiques et l'appellation de la variété, tandis que la qualité à la cuisson et à la consommation est déterminée par les propriétés physico-chimiques, en particulier la teneur apparente en amylose. Dans les pays où la température varie nettement pendant la période de maturation, des différences appréciables de qualité du grain ont été signalées pour une même variété. En Asie tropicale, les propriétés physico-chimiques du grain sont relativement constantes. La valeur nutritionnelle est principalement déterminée par la teneur du riz usiné en protéines.
Les principaux résultats de la recherche sur les aspects économiques de la qualité du grain effectuée de 1987 à 1989 par l'IRRI et par des programmes nationaux de recherche sur le riz en Indonésie, au Bangladesh, en Malaisie, aux Philippines et en Thaïlande sont que la qualité du grain de riz et les préférences en matière de qualité varient selon les pays et les régions, mais que certaines préférences du point de vue de la qualité sont largement partagées (IRRI et CRDI, 1991). Dans tous les pays étudiés, les consommateurs préfèrent un rendement plus élevé du riz entier et des grains plus translucides. Les consommateurs à revenu élevé paient un supplément pour obtenir un plus grand nombre de caractéristiques qualitatives que les consommateurs à bas revenu. Les préférences ne varient guère en fonction du revenu, à une exception près: les consommateurs à bas revenu préfèrent un riz qui soit plus substantiel. L'analyse en laboratoire a révélé que le riz des Philippines portant sur l'étiquette l'appellation d'une variété traditionnelle est habituellement une variété moderne dont la forme ou les caractéristiques de cuisson sont analogues à celtes des variétés traditionnelles (Juliano et al., 1 989b). Par conséquent, l'étiquette «traditionnel» signale au consommateur que ces riz possèdent certaines caractéristiques souhaitables.
TABLEAU 20 - Importance relative des indicateurs de qualité dans les programmes de sélection du riz
Programme de sélection |
Propriétés physiques¹ |
Texture de l'amidon² |
Texture du riz cuit² |
Variétés traditionnelles |
Principal |
Facultatif |
Facultatif |
Variétés modernes |
Important |
Important |
Vérification |
Qualité du grain |
Important |
Vérification |
Important |
¹Teneur en amylose valeur d'étalement alcalin (température de gélatinisation), consistance du gel
²Déterminée par l'évaluation organoleptique ou la méthode instrumentale: Instron Texturometer, Tensipresser, Viscoelastograph, etc. Source: Juliano et Duff, 1991.
Il semble qu'en Indonésie et aux Philippines les incitations qualitatives soient transmises depuis les prix de gros du riz jusqu'au prix du paddy (IRRI et CRDI, 1991). Toutefois, cette transmission n'est pas parfaite. Les études effectuées aux Philippines montrent que les obstacles à l'usinage influent sur la fixation des prix. Les études révèlent la complexité de la transmission, entre les consommateurs et les producteurs, des informations sur la qualité.
Etant donné l'importance que revêtent les caractéristiques relatives à la qualité pour créer et stimuler la demande, surtout chez la population urbaine àrevenu plus élevé, il sera nécessaire de transmettre les informations sur les prix et le marché et d'assurer une meilleure intégration entre les exploitations et les marchés de gros et de détail en vue d'améliorer les prix à la production et d'inciter les agriculteurs à produire un riz de meilleure qualité. Qui plus est, les améliorations de la qualité du grain qui n'entraînent pas une baisse de rendement profiteront d'une manière générale à tous les consommateurs de riz en abaissant le coût du riz de meilleure qualité (Unnevehr et al., 1985). Si les variétés de plus haute qualité sont largement adoptées, les producteurs en tireront profit en conservant un riz de meilleure qualité pour la consommation à domicile et en disposant d'un marché intérieur plus vaste pour leurs produits. En outre, les pays exportateurs de riz bénéficieraient des améliorations qualitatives propres à élargir leur marché potentiel.
Indicateurs de la qualité du grain
Les propriétés physiques, telles que la longueur, la largeur, la translucidité, le degré d'usinage, la couleur et l'âge du riz usiné sont des indicateurs de la qualité du grain. La teneur de l'amidon de riz en amylose est le principal facteur de qualité à la consommation. Cette teneur est directement en corrélation avec l'augmentation de volume et l'absorption d'eau pendant la cuisson et aussi la dureté, la blancheur et la matité du riz cuit (Juliano, 1985b). Les études génétiques ont montré que le non-gluant domine le gluant (Kumar, Khush et Juliano, 1987). Parmi les parents non gluants, la teneur élevée en amylose est totalement dominante sur la teneur faible ou intermédiaire, et la teneur intermédiaire est dominante sur la teneur faible (Kumar et Khush, 1987).
Par température de gélatinisation finale des granules d'amidon, on entend la température de l'eau à laquelle 90 pour cent au moins des granules d'amidon se sont gélatinisés ou ont perdu leur biréfringence (croix de Malte) ou ont gonflé de façon irréversible dans l'eau chaude. Pour les granules d'amidon de riz, la température de gélatinisation est classée comme suit: faible (55-69,5 °C), intermédiaire (70-74 °C) et élevée (74,580 °C). Dans le programme de sélection, la température de gélatinisation se traduit par la valeur d'étalement alcalin basée sur le degré de dispersion de six grains de riz usiné dans 10 ml d'hydroxyde de potassium à 1,7 pour cent après avoir trempé pendant 23 heures à 30 °C (Little, Hilder et Dawson, 1958).
Une température de gélatinisation élevée est peux fréquente, surtout dans les riz à forte teneur en amylose. Une faible température ambiante pendant le mûrissement peut accroître la teneur en amylose et réduire indépendamment la température de gélatinisation de l'amidon (Nikuni et al., 1969; Resurrección et al., 1977; Dien et al., 1987). La température de gélatinisation influe sur le degré de cuisson du riz en raison du gradient de cuisson depuis la surface jusqu'au cœur du grain. Il existe une corrélation directe entre la température de gélatinisation et la durée de cuisson, si bien qu'une faible température de gélatinisation permet d'économiser du combustible, à condition qu'il n'y ait pas d'effets indésirables sur la qualité à la consommation. La température de gélatinisation affecte aussi les propriétés moléculaires de l'amylopectine.
L'épreuve de consistance du gel a été mise au point pour classer la dureté du riz cuit parmi les riz à forte teneur en amylose (Cagampang, Perez et Juliano, 1973). Le classement des riz en fonction de la consistance du gel est le suivant: molle, 61-100 mm; moyenne, 41-60 mm; dure, 27-40 mm. Une consistance du gel molle à moyenne est jugée préférable à une consistance dure, aussi bien pour les riz non gluants que pour les riz gluants. Une forte teneur en protéines contribue à rendre plus dure la consistance du gel. L'amylopectine contribue plus que l'amylose à la consistance et à la viscosité du gel amidon.
TABLEAU 23 - Type de grain de riz, selon la teneur apparente en amylose, préféré dans divers pays producteurs qui fournissent au moins 0,1 pour cent de la production mondiale totale de riz
Gluant |
Faible |
Intermédiaire |
Elevée |
Asie |
|||
Laos |
Chine (japonica) |
Cambodje |
Bangladesh |
Thaïlande (nord) |
Chine: Taiwan (japonica) |
Chine¹ (japonica) |
Chine (Indica) |
Japon |
Inde |
Inde |
|
Corée, Rép. de |
Indonésie |
Pakistan (type IR6) |
|
Népal |
Malaisie |
Philippines |
|
Thaïlande (nord-est) |
Myanmar |
Sri Lanka |
|
Pakistan (Basmati) |
Thaïlande (nord, |
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Philippines |
centre, sud) |
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Thaïlande (centre) |
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Viet Nam |
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En dehors de l'Asie |
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Argentine |
Brésil (culture pluviale) |
Brésil (culture irriguée) |
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Australie |
Côte d'lvoire |
Colombie |
|
Espagne |
Cuba |
Guinée² |
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Etats-Unis |
Italie |
Mexique |
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(grains courts et moyens) |
Libéria |
Pérou |
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URSS |
Madagascar |
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Nigéria |
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Etats-Unis (grains longs) |
¹Données communiquées par l'Institut national chinois de recherche sur le riz Hangzhou.
²Données communiquées par l'Institut international d'agriculture tropicale, Lagos, Nigéria.
Source: Juliano et Duff, 1991.
Parmi les riz du même type apparent pour l'amylose, la valeur d'étalement alcalin et la consistance du gel peuvent être utilisées comme indices de qualité. Pour les riz à forte teneur en amylose, les consommateurs préfèrent une température de gélatinisation intermédiaire et une consistance molle du gel, plutôt qu'une température de gélatinisation faible et une consistance dure du gel (Juliano, 1985b). Parmi les riz à teneur en amylose intermédiaire dérivés du C4-63G, les consommateurs préfèerent un type de produit à température de gélatinisation intermédiaire à un type à faible température de gélatinisation, car le riz cuit est moins dur. Les valeurs de consistance du gel sont analogues parmi ces riz à teneur en amylose intermédiaire. Pour les riz àfaible teneur en amylose et les riz gluants, les consommateurs préfèrent le type à faible température de gélatinisation au type à température de gélatinisation élevée. Du point de vue d'un programme de sélection visant à améliorer la qualité du riz, une consistance de gel dure est dominante par rapport à un gel de consistance moyenne ou molle, et une consistance de gel moyenne est dominante par rapport à une consistance molle (Tang, Khush et Juliano, 1989).
A mesure que de nombreux pays parviennent à l'autosuffisance pour la production de riz, la qualité du grain devient un objectif important des travaux de sélection (Juliano et Duff, 1991). Dans les programmes de sélection traditionnelle' la qualité des deux parents est connue, de sorte que la qualité des lignées est prévisible au moyen d'indicateurs basés sur les propriétés physiques, à savoir la teneur apparente en amylose, la valeur d'étalement alcalin et la consistance du gel (tableau 20). Avec les variétés modernes ou semi-naines issues de parents dont les qualités de grain étaient opposées, les propriétés de l'amidon complètent les méthodes physiques pour classer la qualité des lignées. La sélection en vue de la qualité du grain implique un discernement parmi les souches dont l'amidon a les mêmes propriétés, comme c'est le cas aux Etats-Unis, au Japon, en République de Corée et à l'IRRI où l'indicateur primordial est la texture du riz cuit.
L'aptitude à hériter certaines caractéristiques en ce qui concerne la teneur en protéines est très faible, et l'on observe pour chaque variété une fourchette de 6 points de pourcentage (Coffman et Juliano, 1987). Les facteurs environnementaux influent de façon significative sur la teneur en protéines. Le riz à forte teneur en protéines transfère plus efficacement l'azote de la paille dans le grain en développement, d'où un indice d'azote à la récolte plus élevé (N de la panicule/N de la particule + N de la paille) (Pereze et al., 1973).
Caractéristiques qualitatives des riz dans le monde - échantillons par pays
Dans les pays d'Asie, les riz à forte teneur en amylose prédominent (tableau 21). C'est le type de riz principal au Bangladesh, à Sri Lanka, en Thaïlande et au Viet Nam. Le riz à teneur en amylose intermédiaire prédomine au Bhoutan, au Myanmar et au Pakistan, tandis que le riz à teneur faible en amylose prédomine dans la province chinoise de Taiwan, au Japon et en République de Corée. Les riz à très faible teneur en amylose n'ont été observés qu'au Brunéi, en Indonésie, en République de Corée, au Laos, au Sarawak (Malaisie), au Myanmar, aux Philippines et en Thaïlande. Les riz gluants sont représentés en Chine, en Indonésie, au Japon, en République de Corée, au Laos, en Malaisie occidentale, au Myanmar, aux Philippines et en Thaïlande. Le riz gluant est la denrée de base au Laos et dans le nord et le nord-est de la Thaïlande.
La teneur en protéines de ces échantillons de riz usiné variait de 4 à 14 pour cent, et la teneur moyenne en protéines s'échelonnait entre 6,3 et 9,2 pour cent (tableau 21). La teneur moyenne globale en protéines était de 7,8 pour cent.
Pour les variétés cultivées en dehors de l'Asie, les riz à teneur en amylose faible, intermédiaire ou élevée sont représentés à égalité (tableau 22). Les riz àforte teneur en amylose prédominent en Colombie, au Ghana, au Guatemala, au Nigéria, au Paraguay, au Pérou, en Sierra Leone et au Venezuela. Les riz àteneur intermédiaire en amylose prédominent au Chili, en Grèce, en Hongrie, en République islamique d'Iran, en Italie, au Suriname et au Venezuela. Les riz àfaible teneur en amylose prédominent en Argentine, en Australie, en Bulgarie, en Egypte, en France, au Portugal, en Turquie, aux Etats-Unis et dans l'ex-URSS. Seuls les Etats-Unis ont un riz à très faible teneur en amylose et on y cultive des riz gluants, de même qu'en Australie. La teneur en protéines des échantillons de riz usiné cultivé en dehors de l'Asie variait de 5 à 13 pour cent et les valeurs moyennes de 6,2 à 10,5 pour cent (tableau 22). La teneur moyenne en protéines est de 7,2 pour cent, c'est-à-dire plus faible que pour le riz asiatique (tableau 21).
Le tableau 23 indique les types de riz qui, selon leur teneur en amylose sont préférés dans divers pays producteurs d'Asie et d'ailleurs produisant au moins 0,1 pour cent de la production mondiale totale (Juliano et Duff, 1991). Il semble que le riz à teneur intermédiaire en amylose soit le plus apprécié, suivi des riz à teneur forte ou faible en amylose et, au dernier rang, du riz gluant. Les riz à faible teneur en amylose étaient principalement des riz japonica, sauf en Thaïlande et en Argentine. Les riz thaïlandais sont du type jasmin, ou Khao Dawk Mali 105, qui commence à être apprécié aux Etats-Unis et en Europe. Les riz à teneur intermédiaire en amylose étaient préférés dans le plus grand nombre de pays; ils comprennent les riz basmati, les variétés indonésiennes bulu (javanica), les riz à tiges allongées du Myanmar Nga Kywe ou D25-4 et les variétés des Etats-Unis d'Amérique à grains longs. Dans la plus grande partie de l'Asie méridionale (Bangladesh, Inde, Pakistan et Sri Lanka), on préfère les riz à forte teneur en amylose dont la consistance du gel varie entre moyenne et molle parce qu'ils se prêtent bien à l'étuvage.
Qualité du riz sur les marchés internationaux
Les types de qualité des riz sur les marchés internationaux sont essentiellement les suivantes: riz long de haute qualité; riz long de qualité moyenne; riz à grains courts; riz étuvé; riz aromatique; riz gluant (Efferson, 1985). Chaque qualité est demandée sur différents marchés. Le riz long de haute qualité est vendu principalement en Europe et au Proche-Orient, le riz long de qualité moyenne dans les pays déficitaires d'Asie, le riz à grains courts dans diverses régions àdemande spéciale, le riz étuvé de haute qualité au Proche-Orient et en Afrique et le riz étuvé de qualité inférieure sur des marchés spéciaux d'Asie et d'Afrique. Le riz aromatique est demandé principalement au Proche-Orient. Le riz gluant répond aux besoins du marché au Laos, tandis qu'un volume plus faible est consommé dans d'autres pays.
Dans les économies traditionnellement consommatrices de riz de Hong-Kong et de certains quartiers de Rome (Italie), on a constaté dans les principaux commerces de détail que les caractéristiques de qualité influaient fortement sur le prix de détail (Kaosa-ard et Juliano, 1989). A Hong-Kong, on préfère les riz longs translucides à faible teneur en amylose, à proportion plus forte de riz entier et dont le gel a une consistance plus molle. A Rome, on a observé une corrélation positive entre le prix et le caractère crayeux du riz et une corrélation négative entre le prix et la consistance du gel. Les riz importés étaient plus chers que les variétés japonica locales, dont beaucoup étaient également étuvées. A Bonn (Allemagne), marché traditionnellement non consommateur de riz, la teneur en riz entier était la seule propriété du grain de riz statistiquement importante, le degré de traitement, la taille du lot et les types de conditionnement étant des considérations importantes pour le prix.
On a observé que les riz thaïlandais exportés avaient des propriétés plus variables pour l'amidon que les riz longs des Etats-Unis, principalement du type à teneur intermédiaire en amylose, ce qui reflète la plus grande hétérogénéité de la teneur en amylose et de la température de gélatinisation parmi les variétés thaïlandaises (Juliano, Perez et Kaosa-ard, 1990). Les brisures et le riz entier sont mélangés selon les besoins par l'importateur.