Table des matières - Précédente - Suivante
Les denrées alimentaires offertes à la vente sous forme de produits frais comprennent des parties végétales très diverses appartenant à un grand nombre de familles et d'espèces. Les mots «fruits», «légumes» et «légumes-racines» sont employés par commodité en horticulture et dans la vie de tous les jours, en dehors de toute acception botanique. En tant que denrées alimentaires, toutefois, il peut être intéressant de ranger les produits frais dans diverses catégories: d'après la partie comestible de la plante qui est utilisée, selon qu'ils se prêtent plus ou moins à la manutention après récolte, et d'après leurs caractéristiques d'entreposage.
Racines et tubercules
Il s'agit des parties souterraines de la plante, où sont emmagasinés les éléments nutritifs. Grâce à elles, la plante survit aux conditions saisonnières défavorables, et ce sont elles qui fournissent les réserves nutritives qui permettent à la plante de croître rapidement lorsque les conditions sont favorables.
Partie | Produit |
Tige tubérisée renflée | Pomme de terre (figure 3a) |
Tige tubérisée comprimée | Taro (figure 3b) |
Racine tubérisée (provenant d'une racine fibreuse) | Patate douce (figure 3c) |
Racine tubérisée (provenant de la racine pivotante principale) | Carotte, navet (figure 3d) |
Dans la plupart de ces produits, c'est surtout de l'amidon qui est emmagasiné, mais dans certains tubercules provenant de racines pivotantes, comme les carottes, il s'agit surtout de sucres.
Fleurs comestibles
Les obtenteurs ont produit divers légumes constitués de masses d'inflorescences charnues que l'on peut consommer lorsque les fleurs sont à l'état de bourgeons immatures. Ces légumes sont connus depuis longtemps dans les pays tempérés, mais ces dernières années ils ont également fait leur apparition dans les régions tropicales où l'on a obtenu des cultivars que l'on peut faire pousser en climat chaud ou en altitude. Au lieu d'une inflorescence charnue, l'ananas, qui est l'un des fruits tropicaux dont la production est la plus importante, est formé par la fusion d'une masse de fleurs immatures et non fécondées réunies autour de la tige principale de la plante qui deviendra le cylindre axial du fruit.
Partie comestible | Produit |
Masses d'inflorescences | Brocoli, chou-fleur (figure 4a) |
Fusion de parties florales non fécondées avec la tige principale de la fleur | Ananas (figure 4b) |
Formations herbacées (feuilles, tige, pousses)
Ces légumes verts très communs sont d'importantes sources de sels mi néraux, de vitamines et de fibres. Ils sont très variables d'aspect.
Partie comestible | Produit |
Formations herbacées tout entières au-dessus du sol (avant la floraison) | Chou, laitue (figure 5a) |
Feuilles seulement | Taro, épinard (figure 5b) |
Base renflée de la feuille | Oignons (y compris les oignons |
à bulbe secs), poireaux (figure 5c) |
Figure 3 Racines et tubercules.
Figure 4 Parties florales comestibles.
Figure 5 formations herbacées.
Organes reproducteurs
Il s'agit des organes porte-graines dont on consomme surtout les parties charnues. La plupart sont des fruits bien connus ayant une forte teneur en sucre lorsqu'ils sont murs, stade auquel ils sont généralement consommés. Quelques-uns, les tomates et les poivrons par exemple, sont utilisés en salade ou comme légumes. En outre, plusieurs légumes, tels que les gousses vertes immatures de certaines plantes, se mangent avant que les graines n'aient durci.
Dans quelques cas, seules les graines immatures sont consommées.
Partie comestible | Produit |
Fruits charnus à une seule graine (drupe) | Mangue, avocat, prune (figure 6a) |
Fruits charnus a plusieurs graines | Tomate, agrumes (orange, pamplemousse, mandarine, lime), concombre, poivron, aubergine, banane (figure 6b) |
Gousses vertes immatures contenant des graines partiellement développées | Haricots verts, haricots-asperges, gombo (figure 6c) |
Graines immatures seulement | Pois cajan, petit pois (figure 6d) |
La plupart de ces produits sont indigènes aux régions tropicales et subtropicales et sont sensibles au froid lorsqu'ils sont entreposés.
Les végétaux verts en cours de croissance utilisent l'énergie que leur fournit la lumière solaire captée par leurs feuilles pour fabriquer des sucres en combinant le gaz carbonique de l'air avec l'eau qu'ils puisent dans le sol par leurs racines. C'est ce qu'on appelle la photosynthèse. La plante emmagasine ces sucres tels quels, ou bien elle les combine en chaînes longues pour former de l'amidon. Les sucres et les amidons, dénommés hydrates de carbone, sont emmagasinés dans diverses parties de la plante et utilisés par la suite pour fournir l'énergie nécessaire à la poursuite de la croissance et à la reproduction. Les amidons sont stockés par les légumes tubéreux au cours de la période de dormance pour fournir l'énergie qui sera nécessaire lorsque la plante recommencera à croître à l'issue de cette période. Dans les deux cas, l'énergie qu'exige la croissance est libérée par le processus de la respiration, lequel se produit dans toutes les parties de la plante, avant et après la récolte.
Quelle est l'activité normale des produits frais après la récolte? Comment peut-elle être modifiée par les conditions de l'après-récolte et quels effets ces conditions ont-elles sur les pertes?
Figure 6 Organes reproducteurs (fruits).
Nous avons indiqué plus haut que la détérioration physiologique était l'une des causes des pertes de produits frais après la récolte. On entend par physiologie l'étude des processus qui se produisent à l'intérieur des organismes vivants. Après la cueillette des produits frais, ces processus vitaux se poursuivent, mais sous une forme modifiée. La plante ne pouvant plus remplacer l'eau ni les éléments nutritifs, elle doit puiser sur ses réserves et, lorsque celles-ci sont épuisées, elle subit un processus de vieillissement rapidement suivi de décomposition. Même si le produit n'est pas endommagé ou attaqué par des organismes nocifs, il deviendra impropre à la consommation à cause de ce pourrissement naturel. Les principaux processus physiologiques normaux qui conduisent au vieillissement sont la respiration et la transpiration (figure 7).
La respiration est le processus par lequel les plantes absorbent de l'oxygène et rejettent du gaz carbonique. Comme l'indique la figure 7, l'oxygène de l'air décompose les hydrates de carbone de la plante en gaz carbonique et en eau. Cette réaction produit de l'énergie sous forme de dégagement de chaleur.
La respiration est une réaction fondamentale de tous les végétaux sur pied, et après la récolte. Chez la plante qui pousse, il s'agit d'un processus qui ne s'interrompt jamais tant que les feuilles continuent à fabriquer des hydrates de carbone, et qui ne peut être interrompu sans dommage pour la plante pendant sa croissance ou pour le produit récolté.
Les produits frais récoltés ne peuvent plus remplacer les hydrates de carbone ou l'eau. La respiration utilise alors les réserves d'amidon ou de sucre, et cesse lorsqu'elles sont épuisées; puis viennent le vieillissement, la mort et la décomposition.
Effet de l'air disponible sur la respiration
La respiration exige une bonne aération. L'air contient environ 20 pour cent de l'oxygène indispensable à la respiration normale de la plante, durant laquelle l'amidon et les sucres sont transformés en gaz carbonique et en vapeur d'eau. Lorsque l'air se raréfie et que la quantité d'oxygène libre dans le milieu ambiant descend en dessous de 2 pour cent ou moins, il y a fermentation et non plus respiration. La fermentation décompose les sucres en alcool et en gaz carbonique, et l'alcool ainsi produit confère une odeur désagréable au produit et accélère son vieillissement.
Figure 7 Photosynthèse et respiration.
Effet du gaz carbonique sur la respiration
Une mauvaise ventilation du produit par raréfaction de l'air entraîne également l'accumulation de gaz carbonique autour du produit. Lorsque la concentration de ce gaz atteint I à 5 pour cent dans l'atmosphère, le produit s'abîme rapidement: dégagement de mauvaises odeurs, dissociation des tissus végétaux, arrêt du mûrissement et autres dégradations physiologiques. On voit donc qu'une bonne ventilation du produit est essentielle.
La plupart des produits frais récoltés contiennent entre 65 et 95 pour cent d'eau. L'eau circule constamment à l'intérieur des végétaux sur pied. Elle est absorbée dans le sol sous forme liquide par les racines, puis elle passe dans les tiges et se dégage finalement, sous forme de vapeur d'eau, des parties aériennes de la plante, les feuilles principalement.
Le passage de l'eau à travers les plantes s'appelle «courant de transpiration». Il maintient la teneur élevée en eau de la plante, et la pression ainsi créée contribue à la soutenir. Une plante privée d'eau se fane et meurt.
La surface de toutes les parties végétales est recouverte d'une couche cireuse ou d'une écorce de liège qui limite la déperdition d'eau. La perte d'eau naturelle se produit à travers des pores minuscules qui sont particulièrement nombreux sur les feuilles. Ces pores peuvent s'ouvrir ou se fermer selon l'évolution des conditions atmosphériques, ce qui permet à la plante de contrôler le débit de déperdition d'eau et de maintenir la turgescence des parties végétales.
Les produits frais continuent à perdre de l'eau après la récolte, mais, à la différence de la plante vivante, ils ne peuvent plus remplacer l'eau en puisant dans le sol et doivent donc utiliser la totalité de ce qui leur reste d'eau après la récolte. Cette perte d'eau des produits frais après la récolte est un sérieux problème puisqu'elle entraîne une rétraction et une diminution de poids.
Lorsque le produit récolté a perdu de 5 à 10 pour cent de son poids frais, il commence à se faner et devient bientôt inutilisable. Pour prolonger la durée de vie utile du produit, il faut faire en sorte que la déperdition d'eau soit aussi faible que possible.
Effet de l'humidité relative de l'air sur la déperdition d'eau
Il existe à l'intérieur de toutes les plantes des espaces d'air qui permettent à l'eau et aux gaz de circuler dans les deux sens dans toutes leurs parties. L'air de ces espaces contient de la vapeur d'eau qui combine l'eau du courant de transpiration et celle que produit la respiration. La vapeur d'eau contenue dans la plante crée une pression qui la fait passer à travers les pores situés à la surface de la plante. Le taux de déperdition d'eau des parties végétales dépend de la différence de pression entre la vapeur d'eau contenue à l'intérieur de la plante et la vapeur d'eau de l'air ambiant. Pour que les produits frais perdent le moins d'eau possible, il faut les conserver en atmosphère humide.
Effet du mouvement de l'air sur la déperdition d'eau
Plus le déplacement de l'air ambiant sur les produits frais est rapide, plus l'évaporation l'est aussi. Il est indispensable que l'air circule à travers les produits pour éliminer la chaleur dégagée par la respiration, mais le mouvement de l'air doit être aussi lent que possible. Des emballages bien conçus et un empilement approprié des caisses et des cartons permettront de mieux maîtriser la circulation d'air.
Perte d'eau selon les produits
La déperdition d'eau est plus ou moins rapide selon les produits. Les légumes verts en feuilles, les épinards notamment, perdent leur eau rapidement car ils ont une peau mince et cireuse dotée de nombreux pores. D'autres, les pommes de terre par exemple, ont un taux d'évaporation beaucoup plus faible à cause de leur peau épaisse et rugueuse, aux pores peu nombreux.
La donnée primordiale, en matière de déperdition d'eau, est le rapport entre la surface de la partie végétale et son volume. Plus la surface est grande par rapport au volume, plus l'évaporation sera rapide.
Les fruits charnus passent par un stade naturel de développement que nous connaissons sous le nom de mûrissement. Il se produit lorsque le fruit a cessé de croître et qu'il est arrivé précisément à maturité. A la maturité succède le vieillissement (souvent appelé sénescence) et la décomposition du fruit. Les fruits, au sens qui leur est donné ici, comprennent également des produits utilisés en salades ou comme légumes, tels que les aubergines, les poivrons, les tomates, le fruit de l'arbre à pain et les avocats.
On peut distinguer deux groupes caractéristiques de fruits, d'après l'activité respiratoire au cours du mûrissement:
- Fruits ne présentant pas de pic climatérique. Il s'agit des fruits qui ne mûrissent que sur la plante. Ils sont moins bons s'ils sont cueillis avant d'être complètement mûrs car leur teneur en sucres et en acide n'augmentera plus. Leur activité respiratoire se ralentit progressivement durant la croissance et après la récolte. La maturation et le mûrissement sont un processus graduel. Tels sont les cerises, les concombres, les raisins, les citrons et les ananas.
- Fruits présentant un pic climatérique. Il s'agit des fruits que l'on peut cueillir à maturité mais avant que le mûrissement n'ait commencé. Ces fruits peuvent mûrir naturellement ou artificiellement. Le début du mûrissement s'accompagne d'un accroissement rapide de l'activité respiratoire appelé «pic climatérique». Après le pic climatérique, la respiration se ralentit à mesure que le fruit mûrit et se bonifie. Tels sont les pommes, les bananes, les melons, les papayes et les tomates.
Le commerce des fruits, au niveau de la production et de la commercialisation, fait appel à des techniques de contrôle du mûrissement qui permettent de planifier rigoureusement l'expédition et la distribution.
Effet de l'éthylène sur les produits frais récoltés
Le gaz éthylène, produit par la plupart des tissus végétaux, joue un rôle important dans le déclenchement du mûrissement des fruits. L'éthylène est important pour la commercialisation des produits frais pour différentes raisons:
- Il peut être utilisé commercialement pour déclencher artificiellement le pic climatérique des fruits. Cela permet de cueillir verts des fruits tropicaux comme les mangues et les bananes et de les expédier sur des marchés éloignés où on les fait mûrir sous contrôle.
- La production naturelle d'éthylène par les fruits peut poser des problèmes dans les locaux d'entreposage. De très petites quantités de ce gaz, par exemple, suffisent à endommager les fleurs. L'éthylène détruit la couleur verte des végétaux; les laitues et autres légumes verts mis sur le marché lorsqu'ils sont à maturité, mais non encore mûrs, seront ainsi abîmés s'ils sont entreposés avec des fruits en train de mûrir.
- La production d'éthylène s'accroît lorsque les fruits sont lésés ou attaqués par des moisissures. Cela peut déclencher le processus de mûrissement et faire mûrir prématurément, en cours de transport, les fruits à pic climatérique. Tous les produits doivent être manipulés avec soin pour éviter les meurtrissures pouvant entraîner la décomposition. On n'entreposera pas de produits endommagés ou en cours de décomposition.
- Les agrumes cultivés dans les régions tropicales restent verts alors qu'ils sont déjà mûrs intérieurement sur l'arbre. Leur couleur n'apparaît après la récolte que moyennant un «déverdissage» à l'éthylène (industriel). La concentration du gaz, la température, l'humidité et la ventilation doivent être soigneusement contrôlées dans les lo caux spécialement aménagés, aussi le déverdissage ne se justifie-t-il économiquement que dans le cas des exportations de grande valeur ou des marchés nationaux. Dans la plupart des pays tropicaux, la population locale s'accommode volontiers d'agrumes verts d'aspect, mais parfaitement mûrs à l'intérieur.