3. Analyse du système de post-récolte maïs
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3.1 Le système de post-récolte de la Région
Maritime
3.2 Le système de post-récolte dans
l'exploitation agricole
Pour reprendre les termes de BOURNE (1977, p. 4) et de HARRIS et LINDBLAD (1978, p. 11), la notion de post-récolte comprend "Lensemble des faits commençant après la récolte d'un fruit mûr, sur les lieux ou dans le milieu de formation, jusqu'à sa consommation finale par l'homme".
"Par système, on entend une structure composée de différents éléments, dont chacun est en relation avec les autres. Dans le cas d'un système ouvert à l'environnement, ces relations s'exercent également vers l'extérieur. Les relations existant à l'intérieur du système sont plus intenses que celles qui le relient au monde extérieur, et font par là-même apparaître ce système comme une entité homogène" (DOPPLER 1985, p. 83).
Le système de post-récolte maïs dans le sud du Togo peut être considéré comme un système ouvert, relié à ses phases antérieures et postérieures par des rapports d'interaction. La phase antérieure regroupe l'ensemble des activités liées à la production et à la récolte, la phase postérieure comprenant la consommation et l'utilisation du maïs Considéré d'un point de vue holiste, le système paysan de post-récolte se conçoit comme un sous-système au sein de l'ensemble exploitation/ménage/famille. Ce système lui-même relève de systèmes régionaux, qui s'inscrivent à leur tour dans les systèmes existant au niveau national. Pour une région donnée (économie nationale) le système de post-récolte constitue en l'occurrence une structure dynamique, dans laquelle les différents systèmes partiels sont reliés entre eux par des rapports d'interaction, et dans laquelle l'homme, en tant qu'élément agissant, exerce une fonction de commande.
3.1 Le système de post-récolte de la Région Maritime
3.1.1 Aperçu de la connexité des systèmes
3.1.2 Commercialisation du mais
3.1.3
Stockage du maïs
3.1.4 Pertes au sein du système de
post-récolte
3.1.5 Mesures de protection des récoltes
3.1.1 Aperçu de la connexité des systèmes
Le système de post-récolte des petites exploitations agricoles, et en particulier le système de stockage pratiqué au niveau individuel, constitue le système partiel essentiel au sein du système global de post-récolte (cf. figure 3.1).
Suivant le lieu de consommation final (autoconsommation sur l'exploitation agricole, vente) et l'utilisation qui en est faite (nourriture, semence, aliment pour le bétail), le maïs passe par différents circuits. En fonction du degré de commercialisation, diverses personnes (décideurs) sont en mesure d'influer sur le maïs au sein du système de post-récolte, que ce soit au moment de la transition entre deux niveaux (transport), dans une phase stationnaire (stockage), ainsi que lors de la transformation en d'autres produits (traitement). Quand il n'est pas utilisé pour les besoins propres de l'entreprise, le maïs est transmis au consommateur final par le biais du système de commercialisation. Le système de postrécolte s'augmente dans ce cas d'une composante de commercialisation, le marché apparaissant alors comme le lien entre le producteur et le consommateur. Il y a ainsi une connexité directe entre la complexité du système de post-récolte et le degré de commercialisation.
Fig. 3.1: Système de post-récolte du maïs de la Région Maritime
Le maïs. qui vient s'intégrer au système provient principalement de petites exploitations agricoles. Il est certain que sur un territoire aux limites bien définies, comme la Région Maritime, l'approvisionnement en produits peut être complété par des importations à partir de régions voisines et/ou en provenance de l'étranger. C'est l'entreprise publique TOGOGRAIN ( Office National des Produits Vivriers.), ainsi qu'un certain nombre d'entreprises privées, qui s'occupent de l'importation et de l'exportation du maïs.
Au sein d'une communauté, le décalage temporel et spatial entre la production et la consommation rend un stockage nécessaire. Dans la Région Maritime, le mais est entreposé dans les exploitations agricoles, chez les commerçants et au sein de l'entreprise publique de commercialisation TOGOGRAIN (figure 3.1). Lorsque le mais n'est pas consommé directement après son achat, il est également stocké chez le consommateur final durant une brève période. Selon le moment où intervient le stockage du maïs. il existe certaines différences au niveau de la finalité du stockage, des méthodes, des quantités et de la durée de stockage. Pour une communauté, l'importance des divers stades de stockage est fonction du niveau auquel la quantité de maïs la plus importante sera stockée durant une période prolongée.
3.1.2 Commercialisation du mais
Il existe dans la Région Maritime deux systèmes de commercialisation: le système traditionnel et le système public. Ces deux systèmes diffèrent l'un de l'autre par leur structure, les modes de comportement des usagers du marché, de même que par leur efficacité. Le système de commercialisation traditionnel est en effet supérieur au système pratiqué par l'État. Plus de 90 % du mais commercialisé passe par les circuits du système de commercialisation traditionnel (THENEVIN 1987, p. 46), qui est adapté aux structures rurales et relève presque intégralement du domaine de compétence des femmes.
On trouvera dans les considérations qui vont suivre une description des particularités du système de commercialisation traditionnel, du point de vue de l'organisation et des institutions qu'il fait intervenir, de même qu'une description du rôle joué par les différents intermédiaires du commerce du maïs Ces considérations s'appuient d'une part sur des observations, ainsi que sur les résultats d'une enquête menée sur les principaux marchés du maïs de la Région Maritime. On a interrogé ici à Tsévié, Vogan, Tabligbo, Anécho, de même que sur deux marchés au mais de Lomé les groupes de personnes qui prennent part au commerce du maïs.
Le commerce du maïs concerne cinq groupes différents: les producteurs, les acheteurs, les commerçants (gros et détail), les vendeurs et les transporteurs. Les rapports entre les groupes participant à la commercialisation du maïs ne sont pas limités au simple négoce. Echange d'informations, octroi de crédits et emprunts, telles sont les autres fonctions que l'on trouve au sein du système de commercialisation.
Le cultivateur et sa famille sont le premier maillon au sein de la chaîne de commercialisation. Dans la période qui suit la production, ils remplissent au sein du système un certain nombre de fonctions. Ils effectuent le premier traitement, celui qui précède la vente, apportent le maïs aux marchés locaux et, du fait qu'ils prennent en charge le stockage sur l'exploitation, ce sont eux qui assurent la fonction primordiale de stockage au sein du système régional de post-récolte.
Les acheteurs ("commissionnaires" intermédiaires ) sont les intermédiaires entre les producteurs et les commerçants. Ils exercent leurs activités à l'échelon du village, où ils achètent le maïs soit directement chez le cultivateur, sur l'exploitation, soit sur les marchés de gros locaux, pour le transmettre ensuite aux commerçants. Les marchands d'une certaine importance ont en général dans les villages des acheteurs qui jouissent de la confiance des paysans et achètent directement auprès de ces derniers.
Les commerçants ( grossistes ) assurent la distribution de la marchandise depuis les marchés de production jusqu'aux marchés de consommation, où ils la vendent directement au consommateur, ou encore à des revendeurs. Les petits commerçants, quant à eux, pratiquent un commerce purement local, à l'échelon du village, les grossistes traitant surtout des affaires directes. Les grossistes, qui sont bien organisés, jouissent d'une haute considération dans la société, du fait qu'ils font souvent crédit, aussi bien aux cultivateurs qu'aux revendeurs.
Les revendeurs ( "revendeuses-détaillantes.) sont soit indépendants, soit au service d'un grossiste, auquel ils sont en général liés par un contrat. Ce sont les revendeurs qui se chargent de la distribution finale aux consommateurs et qui, en fonction de la demande, vendent parfois le maïs en petites quantités.
Le transport sur de grandes distances est assuré par des entreprises de transport locales. Il s'effectue dans la plupart des cas au moyens de petits véhicules d'une tonne de charge utile.
La marchandise est vendue exclusivement au volume. Les unités de mesure sont constituées par des sacs et des mesures de capacité spéciales ( bol ). Le poids de ces mesures de capacité varie en fonction de leur taille et du mode de remplissage. La mesure de la quantité de mais est effectuée soit normalement, soit "avec la main . Le remplissage "avec la main veut dire qu'en plus de la mesure de capacité, l'intéressé remplit également ses deux mains de mais. Le poids des mesures de capacité varie d'un village à l'autre. Il se situe entre 1,3 et 3,7 kg pour le remplissage normal, auxquels il faut ajouter de 10 à 15 % pour le remplissage avec la main . Les sacs contiennent normalement 100 kg de maïs en grains, bien que leur poids puisse être porté à 115 kg par des techniques de remplissage adéquates. Lorsqu'on vend un grenier entier, on répartit les épis de maïs. en 10 tas ayant approximativement le même volume, puis on détermine le volume de grains de chacun des tas après déspathage et égrenage et on calcule sur cette base le nombre total de mesures de capacité. Les gens sont parfaitement familiarisés avec ces mesures de capacité et sont capables d'estimer les différences, même minimes.
La composition des prix sur le marché est fonction de l'offre et de la demande. Les prix pratiqués sur le marché sont influencés par ceux qui prévalent sur les marchés voisins, ainsi que par le prix du mais à Lomé. Le cours du jour fournit une base de marchandage pour la fixation d'un prix individuel entre l'acheteur et le vendeur.
Le prix est également influencé par d'autres facteurs, à savoir les propriétés qualitatives du maïs de même que les rapports personnels entre l'acheteur et le vendeur. Entre toutes les espèces, la préférence du consommateur va aux espèces traditionnelles à grains blancs, qui possèdent un faible taux d'humidité et ne présentent pas de traces d'endommagement, car ce sont elles qui se prêtent le mieux à la confection de la "pâte" (une forme particulière de préparation du maïs et qui possèdent la saveur à laquelle le consommateur est habitué. Si le maïs ne présente pas les caractéristiques indiquées, le vendeur est obligé de consentir une réduction de prix. Les relations personnelles transparaissent dans la technique de remplissage des mesures de capacité, ce qui fait que l'on peut acquérir pour le même prix des quantités de mais différentes.
Le stockage du maïs revêt au sein du système de post-récolte régional une importance décisive dans la mesure où des pertes élevées peuvent se produire lors du stockage. Le meilleur moyen pour réduire les pertes de post-récolte consiste à améliorer les méthodes de stockage et à prendre des mesures de protection adaptées.
Les différents niveaux de stockage varient selon qu'ils sont plus ou moins répandus, ainsi qu'en fonction des quantités stockées et de la durée de stockage (tableau 3.1). Dans la Région Maritime, c'est le stockage chez les paysans qui constitue le niveau essentiel (SOTED 1982, p. 18). Le stockage chez le vendeur final, dans les entrepôts de TOGOGRAIN ou chez le consommateur, ne joue qu'un rôle mineur.
Tabl. 3.1: Stockage du maïs au sein du système de post-récolte de la Région Maritime
Niveau de stockage | Fréquence | Quantité | Durée de stockage |
Paysan | |||
- individuel | très fréquent | 0,5-1 t | 4 -8 mois |
- collectif | fréquent | 1 à-5t | 4-8 mois |
Commercial | |||
- petit commerçant | fréquent | 0,2 - 2 t | 1 - 4 semaines |
- grossiste | peu fréquent | 10 - 20 t | 1 - 4 mois |
- vendeur | fréquent | 20 - 50 kg | 0 - 2 jours |
Public | rare | 1 000 - 6000 t | 1 - 3 ans |
Consommateur | fréquent | 0 - 30 kg | 0 - 7 jours |
Sur les exploitations agricoles, on stocke le maïs surtout pour assurer la subsistance de la famille. Le maïs stocké constitue par ailleurs une source importante lorsqu'il y a un besoin d'argent liquide.
Le maïs est le plus souvent stocké en épis, avec les spathes. Le stockage du maïs en grains est peu répandu. Le stockage individuel prend différentes formes. Les épis de maïs sont habituellement entassés sur le sol, ou sous le toit de l'habitation, ou encore stockés dans des greniers traditionnels. Le stockage de maïs en grains dans des sacs demeure un phénomène marginal. La quantité stockée sur l'exploitation varie entre 0,5 et 1 t. Il est rare qu'elle atteigne plusieurs tonnes. La durée de stockage varie entre 4 et 8 mois. Le type de stockage individuel est caractéristique des modes de production du maïs sur des surfaces appartenant à l'exploitation. Dans le cas de la production de maïs sur des surfaces en exploitation commune, le stockage se fait en général dans des entrepôts collectifs. La plupart du temps, il s'agit en l'occurrence de greniers traditionnels de plusieurs tonnes de capacité. Certains collectifs de production disposent d'entrepôts d'une capacité de stockage de 25 t, qui se prêtent également à la fumigation. La durée de stockage dans les entrepôts collectifs est elle aussi de 4 à 8 mois.
75 % environ de la récolte de maïs sont stockés dans des systèmes de greniers traditionnels (SOTED 1982, p.18). La conservation de réserves dans des entrepôts collectifs (magasins fumigables) ne revêt qu'une importance secondaire.
Le volume des transactions effectuées par les petits commerçants est de l'ordre de 0,5 à 1 t par semaine, celui des grossistes de plusieurs tonnes. Chez ces deux catégories de commerçants, le maïs est entreposé avant d'être vendu, et ce durant une période allant de quelques jours à quelques semaines. Leurs capacités de stockage correspondent en général à leur volume de transactions mensuel. La quantité stockée chez les petits commerçants est de l'ordre de 0,2 t, celle des grossistes variant de 10 à 20 t.
3.1.4 Pertes au sein du système de post-récolte
Il existe au sein du système de post-récolte un certain nombre de facteurs exerçant des effets négatifs sur le mais, ce qui se traduit par des dommages, et parfois également des pertes. Les dommages se manifestent sous forme d'altération physique du maïs récolté ou stocké. On ne peut parler de pertes que lorsque les modifications subies par le maïs. entraînent pour le propriétaire une baisse de profit.
L'état phytosanitaire du grain au moment de la récolte constitue un élément déterminant pour les pertes. L'état physique du grain (teneur en humidité, grain endommagé ou non), le degré d'infestation par les ravageurs ou les micro-organismes, de même que les propriétés du grain sur le plan qualitatif constituent en l'occurrence d'importants indicateurs. L'utilisation qui est faite du maïs (aliment, semences) détermine ici quelles sont les propriétés qualitatives essentielles.
Le stockage du maïs récolté peut être conçu en tant que processus biologique (voir à ce propos STEIN 1986, MULTON 1982b, TROUDE 1982 et CALDERON 1981), dont l'équilibre, instable, est soumis à diverses influences anthropogènes (figure 3.2). Le grain lui-même, ainsi que les facteurs biotiques et abiotiques, sont les éléments déterminants du système. En tant qu'élément agissant consciemment, l'homme est en mesure d'intervenir dans ce système biologique à tout instant et en tout lieu.
Fig. 3.2: Composantes biologiques du système de post-récolte
Les éléments primordiaux de ce système sont les grains, avec leurs propriétés bio-physicochimiques (structure, activité enzymatique, capacité de rétention de l'eau et conductivité hydraulique, éléments composants, etc.), qui sont fixés au rachis et enveloppés dans des spathes. En association avec le grain, on trouve toujours des microorganismes (bactéries, levures et champignons), qui forment une partie de l'environnement vivant direct. D'autres êtres vivants sont par ailleurs susceptibles de séjourner dans ce milieu, comme par exemple des insectes (coléoptères, termites, etc.), ainsi que de petits vertébrés (oiseaux et rongeurs). Les facteurs abiotiques intervenant à partir de l'extérieur: eau, température, air, sont les composantes qui stimulent (ou entravent) l'activité biologique à l'intérieur du système. En tant que mesure de la vitesse de réaction, le facteur temps joue ici un rôle décisif.
Entre le grain et les facteurs biotiques et abiotiques, il existe différentes interactions, dont certaines sont particulièrement complexes, et dont l'importance et la direction peuvent changer avec le temps. Une élévation de la température extérieure entraîne par exemple une baisse de l'humidité relative, d'où une accélération de la perte d'eau au niveau du grain. Ce phénomène peut cependant avoir en même temps des effets stimulants sur les agents pathogènes, avec pour conséquence une augmentation de l'activité alimentaire chez les ravageurs, entraînant à son tour une augmentation des pertes.
Les grains de maïs possèdent toute une série de propriétés qualitatives (tableau 3.2), leur valeur étant déterminée par l'usage auquel on les destine (alimentation, semence, aliment pour le bétail).
Tabl. 3.2: Propriétés qualitatives du maïs
Qualité | Propriété | Paramètres | Utilisation (exemple) |
agronomique | Etat du germe | Pouvoir de germination | Semences |
technologique | Etat blochimique | Activité enzymatique | Bière |
Valeur meunière | Teneur en eau | Farine | |
alimentaire | Valeur nutritive | Valeur énergétique | Aiment pour le bétail |
Valeur protéinique | |||
Caractéristiques organdeptiques | Odeur. couleur, goût, texture | Bouillie de maïs |
Lorsque le maïs. est utilisé comme semence, c'est la qualité agronomique du grain qui a la priorité absolue. Le pouvoir germinatif, qui est avant tout fonction du non-endommagement du germe, constitue en l'occurrence un critère de qualité essentiel. Pour ce qui est de l'utilisation comme aliment, c'est la qualité nutritive d'ensemble, et plus particulièrement les propriétés nutritives (composantes dispensatrices de valeur) qui sont au premier plan.
Types de pertes
Les structures-mêmes du système de post-récolte permettent d'en déduire un certain nombre de critères de classification. Si l'on examine le "circuit" effectué par le maïs au sein du système, on peut, après que le maïs. soit passé par les diverses phases, répartir les pertes en différentes catégories: pertes de récolte, de transport, de stockage, et pertes de traitement. Nous donnerons plus loin une description plus précise des pertes subies (par ex. des pertes de stockage chez les petits exploitants) en faisant intervenir en l'occurrence les décideurs compétents aux divers niveaux concernés.
Autre caractéristique significative pour la classification des types de pertes: les altérations physiques subies par le produit. Ce point de vue intègre les propriétés qualitatives et quantitatives du maïs au processus d'analyse des pertes. Toute modification de ces propriétés entraîne des pertes quantitatives ou qualitatives, que l'on peut aussi qualifier de pertes physiques dans la mesure où elles se rapportent directement au produit.
En fonction de ces interférences logiques concrètes, les types de pertes peuvent être classés comme suit:
Pertes quantitatives:
Selon ADAMS (1977b, p. 3), il convient de faire la distinction entre les pertes de poids apparentes et les pertes effectives, puisque aussi bien une réduction de poids ne signifie pas forcément une perte quantitative. La perte de poids apparente définit les limites de la modification de poids qu'un produit subit au cours d'une certaine période d'observation, postérieure à la récolte. Les pertes réelles sont susceptibles de demeurer cachées, ce qui est dû aux variations taux d'humidité du grain ainsi qu'à d'autres facteurs (part de farine de forage, poussière, etc.). Les pertes quantitatives effectives correspondent donc aux pertes apparentes, corrigées sur la base des modifications subies par le produit en raison du taux d'humidité, du poids de la farine de forage, de la poussière et des insectes.
Pertes qualitatives:
Les pertes qualitatives sont lices à un amoindrissement des propriétés qualitatives, Lutilisation finale du mais jouant un l'occurrence un rôle déterminant. Si l'on désire par exemple utiliser le maïs. stocké pour les semences, c'est sa qualité agronomique qui aura la priorité. Pour ce qui est de l'utilisation à des fins alimentaires, on se fondera pour l'appréciation de la qualité sur les propriétés nutritives et les caractéristiques organoleptiques du mais. Etant donné qu'il n'existe pas au Togo de standards de qualité en la matière, on a recours pour évaluer les pertes qualitatives à des critères d'examen subjectifs tels que l'aspect et le degré d'infestation.
Pertes économiques:
Toute modification ayant pour conséquence une baisse de profit chiffrable peut être définie comme perte économique. En règle générale, les pertes physiques se traduisent également par des pertes économiques, qui se répercutent, pour un faible volume, au niveau de l'autoconsommation (nécessité de procéder à des achats complémentaires), ou sur l'approvisionnement du marché (diminution des quantités à la vente), ou encore qui deviennent des facteurs de coûts lorsque l'on veut les supprimer, ou du moins les réduire. Il n'y a pas de pertes économiques quand les pertes physiques n'affectent ni le produit de la vente, ni les coûts. Si par exemple la valeur protéique d'une denrée stockée diminue au fur et à mesure que le stockage se prolonge, mais que l'on est en mesure de la vendre au même prix qu'un produit au contenu protéique supérieur, il n'y aura pas, du point de vue de la gestion, de perte économique. Du point de vue de l'économie nationale, en revanche, il peut en résulter une perte, dans la mesure où l'acheteur du produit se voit contraint de couvrir ses besoins en protéines en produisant ou en achetant davantage. Il convient donc d'évaluer différemment la perte économique selon que l'on se place du point de vue de l'économie d'entreprise ou de celui de l'économie nationale. La perte économique ne constitue donc pas une grandeur absolue du fait qu'elle dépend d'une part du point de vue de l'observateur, et de l'autre de l'utilisation du mais.
Origine des pertes
BOURNE (1977, p. 10) divise les causes de pertes du système de post-récolte en deux groupes. Parmi les facteurs entraînant les pertes, il établit ici une distinction entre les facteurs d'influence primaires et les facteurs secondaires. Les causes de pertes primaires englobent l'ensemble des facteurs qui endommagent directement le maïs. Outre les facteurs biotiques et abiotiques, ce sont ici les forces intrinsèques du grain, ainsi que certaines activités déployées par l'homme. Les causes de pertes secondaires peuvent être aussi bien de nature biologique qu'anthropogène. Il s'agit en l'occurrence de facteurs d'influence qui entraînent une altération du mais par le biais d'un dommage indirect. Indépendamment des causes de pertes primaires et secondaires, le propriétaire du mais peut également subir une perte économique liée à une chute des prix intervenue durant la période de stockage. Cette perte économique est à considérer comme rapport de stockage négatif. A l'inverse, le propriétaire peut tout aussi bien réaliser des bénéfices sur le stockage en cas de hausse des prix.
3.1.5 Mesures de protection des récoltes
La notion de protection des récoltes englobe l'ensemble des mesures visant à éviter les pertes de maïs au cours du transport, du stockage, de la commercialisation et de la transformation. Au niveau des différentes phases de stockage, les décideurs concernés peuvent contribuer, par le choix de mesures de protection appropriées, à ce que les pertes de post-récoltes subies par une communauté demeurent réduites.
Pour reprendre l'analyse de REISCH et ZEDDIES (1983, p. 160), nous dirons que les mesures de protection de post-récolte se subdivisent du point de vue des décisions en deux secteurs. Le premier de ces secteurs comprend la totalité des mesures inhérentes, au départ, au système de post-récolte, et qui contribuent ainsi à l'amélioration des conditions de récolte, de transport, de stockage et de commercialisation du maïs Ces mesures, qui ne visent pas à la suppression de causes de pertes déterminées, doivent être considérées comme des mesures préventives à caractère général. Le second secteur regroupe les mesures qui ont au contraire pour but la lutte directe et la défense contre les causes de dommages. Il s'agit dans le dernier cas de mesures de protection de post-récolte curatives, dont on peut, en partant du point de vue précédemment adopté, distinguer deux groupes. Le critère de répartition est le suivant: a-t-on pu établir, à la suite du diagnostic sur les facteurs de dommages, une cause de pertes directe, ou doit-on s'attendre aux effets résultant d'un facteur de pertes quelconque ? Si l'on est en présence d'une cause directe, on peut entamer la lutte par des moyens thérapeutiques. Si l'on s'attend de manière générale à des dommages quelconques, on peut alors prendre des mesures prophylactiques.
Selon les causes de pertes, on a la possibilité de mettre en oeuvre des procédés physicomécaniques, chimiques ou biologiques. Au niveau des petits paysans, on trouve encore à l'heure actuelle des mesures de protection à caractère religieux, qui trouvent leur origine dans les croyances animistes. A l'échelon de l'Etat, on trouve principalement des processus administratifs, tels que l'autorisation de certains insecticides ou la prise de mesures de quarantaine, processus qui sont réglementés par des lois et décrets. Le choix de la méthode de stockage détermine de façon décisive celui des mesures hygiéniques ou curatives destinées à éviter les pertes.
On trouvera au tableau 3 quelques exemples de mesures de protection des stocks au Togo, présentées selon les critères de classification mentionnés ci-dessus. Parmi les mesures préventives, on trouve au premier rang la sélection des espèces, l'époque à laquelle intervient la récolte, l'hygiène de stockage et l'absence d'infestation au moment de la récolte. Les principales mesures prophylactiques consistent dans le traitement par les insecticides et par les produits traditionnels.
Tabl. 3.3: Mesures de protection des stocks de maïs au Togo
Procédés | Mesures de protection des stocks | ||
Mesures préventives | Mesures curatives |
||
prophylactiques | thérapeutiques | ||
mécaniques/ physiques |
Sélection des espèces | Séchage | Elimination manuelle des insectes nuisibles |
Période de récolte | Tri des épis infestés | ||
Hygiène de stockage | |||
chimiques | Traitement aux insecticides | Fumigation | |
biologiques/ biotechniques |
Traitement aux moyens traditionnels | Antagonistes naturels | |
religieux/ culturels |
Prières | ||
Sacrifices | |||
Fétiches | |||
législatifs/ administratifs |
Quarantaine | ||
Homologation d'insecticides |
La fumigation d'un entrepôt au moyen d'hydrogène phosphoré constitue l'exemple type d'une mesure thérapeutique de protection des stocks. Les méthodes biologiques consistent dans la mise en oeuvre d'antagonistes et de procédés biotechniques. Depuis l'apparition du Grand Capucin des Grains, ces procédés font, sur place, l'objet d'intenses recherches. L'homologation d'insecticides binaires, de même que l'observation de mesures de quarantaine sont deux exemples de mesures administratives. Les prières, sacrifices et comportement rituels relèvent des mesures de protection de type religieux.