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3. Conclusions

Table des matières - Précédente - Suivante

3.1 Dans la province du Mono

3.1.1 L'utilisation des pesticides

L'utilisation de pesticides dangeureux tels que l'aldrine (DDT), pour la protection des stocks vivriers, est une pratique encore courante qui justifierait des interventions rapides. Cette action de contrôle sur la diffusion des pesticides est pour le moment rendue impossible en raison de l'absence d'une législation adéquate en la matière.

3.1.2 Apparition du Prostephanus

La propagation récente de cet insecte ravageur est inquiétante, d'autant plus que le danger qu'elle présente n'est pas encore bien perçue par les paysans.

Au moment du passage du projet, des équipes d'agence locaux, assistés par la Coopération allemande (GTZ), parcouraient déjà la province en vue de délimiter les zones infestées. De l'avis même des techniciens allemands rencontrés, l'extension de cette invasion dans d'autres provinces, sinon d'autres pays voisins, sera très difficile à éviter.

3.1.3 Difficultés pour le transport des récoltes

Pour les paysans rencontrés, la contrainte majeure à laquelle ils se heurtent en ce qui concerne leur système post-récolte est l'évacuation des produits du champ au village. Cette contrainte a pour conséquence des retards dans l'engrangement des récoltes, avec des risques accrus d'infestations au champ, et maintenant de vols. Pour eux, la solution à ce problème réside dans l'introduction de la traction animale.

3.2 Dans la province du Borgou

3.2.1 Evolution du stockage du mais dans les zones à culture de rente

La tendance observée dans cette province va de plus en plus vers l'utilisation de magasins en banco avec toiture en tôle pour le stockage des épis de mais en vrac et à même le sol, à la place des greniers traditionnels. Les causes de cette évolution sont les suivantes:

(Autrefois, par exemple, les bois nécessaires aux charpentes des greniers se trouvaient à proximité des villages et résistaient aux intempéries et aux termites pendant quatre à six ans ).

3.2.2 Limites du stockage en magasin paysan

Bien que présentant: des avantages (longévité de la construction et sécurité du stock), le stockage dans ces magasins présente plusieurs inconvénients:

3.2.3 Contraintes relatives à la commercialisation du mais

A la suite de la bonne récolte de mais de 1984 et de l'opération triangulaire en direction du Niger, financée par les Pays-Bas (5 000 t livrées au Niger sur un total de 8 065 t achetées par l'ONC), les producteurs ainsi encouragés ont maintenu un haut-niveau de production en 1985. Par manque de fonds, l'ONC n'a malheureusement pu acheter jusqu'à ce jour que 500 t. environ. Il en résulte une inquiétude pour le présent et. un risque pour la production à venir. C'est ce que les paysans ont exprimé à leur manière en disant qu'ils étaient prêts à livrer immédiatement tout: leur stock à l'ONC, plutôt que de subir des pertes dans leurs magasins, quitte à n'être payés que plus tard.

3.2.4 Apparition d'autres techniques traditionnelles de stockage

L'installation relativement récente de populations Somba venant de l'Atakora, suite à un manque de terres disponibles dans leur province d'origine, a été notée par le projet dans le Borgou. Ces populations ont émigré avec leurs traditions, notamment avec leurs méthodes de stockage en greniers de banco (cf. figure A.4), qui semblent très élaborées. Ces méthodes mériteraient d'être mieux étudiées et testées, en vue d'être évaluées pour le stockage du mais dans la région.

Figure A.1: Grenier traditionnel appelé Bliva (sud du Bénin). Utilisé pour le stockage du mais en épis non déspathés.

Figure A.2: Grenier traditionnel Bariba (nordest du Bénin). Entièrement construiten matières végétales. Utilisé pour le stockage des épis de sorgho et de mais.

Figure A.3: Nouvelle structure de stockage, appelée magasin. Remplace le grenier traditionnel dans certaines régions. Stockage en épis ou en grain battu dans des sacs posés à même le sol.

Figure A.4: Greniers traditionnels Somba (nord-ouest du Bénin), utilisés pour le stockage du grain battu. Celui de gauche montre le corps du grenier fait en banco mélangé de paille. Celui de droite illustre la toiture de paille montée en deux parties: l'une, fixe, protégeant bien le corps du grenier, l'autre, amovible, recouvrant l'ouverture au sommet du grenier. Ce petit couvercle conique se termine par un crochet permettant de l'accrocher au rebord de l'ouverture, lors des manutentions L'intérieur du grenier est divisé en compartiments (deux à quatre) permettant de séparer des produits différents.

 

B. Burkina Faso

Situé principalement dans la zone soudano-sahélienne, le Burkina Faso n'en a pas moins souffert des effets de la longue sécheresse des dernières années. Cela est vrai, bien sûr, pour sa partie sahélienne, au nord du pays, mais aussi pour le plateau central, caractérisé par une forte densité de population. En revanche, la partie sud, plus humide et moins peuplée, a été beaucoup moins touchée.

Le mil et le sorgho sont les deux principales productions céréalières et constituent la base de l'alimentation. En outre, on y trouve du maïs, produit principalement dans le sud, et- du riz, cultivé dans les bas-fonds et les vallées aménagées.

Le projet a pu visiter, d'est en ouest, quatre zones habitées par des groupes ethniques différents, à savoir: à l'est, les Gourmantché, au centre, les Mossi, au centre-ouest, les Gourounsi (Lela), au sud-ouest:, les Dagari et les Lobi. Ces divers groupes sociaux ont, depuis des siècles, des techniques de récolte et de stockage assez semblables, mais avec malgré tout suffisamment de variantes ou de particularités pour qu'elles soientprésentées séparément.

1. Systemes post-recolte

1.1 Récolte et séchage

1.1.1 Zone est: Gourmantché

Chez les Gourmantché, la méthode de récolte la plus courante consiste à couper les tiges de mil et de sorgho à la base pour les coucher sur le champ. Ce n'est généralement que plusieurs jours après que les épis secs sont cassés à la main, sans l'aide d`outil, et entassés sur une aire balayée, à proximité du champ. Les épis ainsi entassés ne sont: pas protégés, si ce n'est- parfois par des seccos qui les recouvrent et/ou par des branches épineuses placées tout autour du tas. Les épis restent ainsi dix jours en moyenne sur cet-te aire, appelée "aire de séchage". En fait-, les récoltes de mil et sorgho sont généralement faites entre la mi-novembre et: la mi-décembre, soit un mois et demi environ après la saison des pluies. A ce moment-là, l'humidité des grains est déjà bien inférieure au seuil critique pour une bonne conservation 1/. C'est- pourquoi, on peut dire que le délai de dix jours observé avant la mise en grenier, qui expose le stock aux déprédations des rongeurs et parfois des animaux d'élevage, n'est- pas justifié par des besoins de séchage, mais plutôt par l'insuffisance des moyens de transport et: la nécessité de restaurer ou de construire les greniers.

1.1.2 Zone centre: Mossi

Chez les Mossi, après le préstockage au champ tel qu'il est décrit cidessus, les récoltes sont: transportées au village où les épis sont entreposés dans des structures temporaires de stockage. Ces structures, faites de seccos, sont directement installées sur le sol autour d'une aire commune de battage. L'opération de battage elle-même qui rassemble la plupart des habitants du village, nécessite une bonne préparation et se déroule en général deux mois plus tard, chaque famille étant assistée par les autres à tour de rôle. Le battage est fait à l'aide de longs morceaux de bois, utilisés comme fléaux, et le vannage, avec des pelles également en bois, qui servent à lancer les sous-produits de battage en l'air jusqu'à une hauteur d'environ 2 m du sol. Cette opération n'est possible qu'en janvier-février, pendant les périodes où l'harmattan souffle fortement. Les grains sont récupérés à l'aide de petits balais et assemblés en tas en vue de leur transport au grenier.

1.1.3 Zone centre-ouest: Gourounsi (Lela)

Les techniques de récolte et de séchage des Gourounsi (sous-groupe Lela) comme de plusieurs autres ethnies du Burkina Faso, qui pratiquent également le stockage en épis, sont, identiques à celles des Gourmantché et ne nécessitent donc pas une description particulière.

1.1.4 Zone sud-ouest: Dagari et Lobi

Chez les Dagari et les Lobi de la province de la Bougouriba, toutes les opérations de séchage et de conditionnement des produits vivriers (mil, sorgho, mais) avant la mise en grenier se déroulent sur les terrasses des habitations.

En effet, aussitôt après la coupe des tiges de mil et de sorgho par les hommes, les femmes enlèvent les épis et les transportent au village. Le sorgho sera séché au soleil sur les terrasses pendant une semaine en moyenne, avant d'être battu, du moins chez les Dagari, puis stocké sans être vanné. En revanche les épis de mil, déjà suffisamment secs au moment de la récolte, sont: hachés en menus morceaux de 2 à 3 cm en vue de leur stockage. Quant aux épis de maïs, ils sont déspathés et- étendus sur la terrasse et, s'il n'y a pas de pluie, une semaine suffira pour les sécher.

Pour le riz, l'opération est différente. En effet, on le laisse sécher sur pied pendant deux à quatre semaines après maturité, puis il est récolté et battu aussitôt au champ.

1.2 Stockage

1.2.1 Structures et techniques de stockage

1.2.1.1 Zone Gourmantché

Chez les Gourmantché, aussitôt après le préstockage au champ, les récoltes sont stockées en épis dans des greniers en paille. Le grenier typique, appelé Bwabwari, est constitué d'une ossature en branches provenant normalement d'arbres dont le bois est résistant aux termites (cf. figure B.2). Les villageois utilisent de préférence Acacia senegal (Likongouabi en gourmantché) ou Dalbergia melanoxylor (Siébou en gourmantché, ou ébène du Sénégal). Deux grands seccos (7 m de long sur 1,50 m de large, chacun) superposés et attachés de l'intérieur à l'ossature, forment les parois du corps du grenier. Trois petits seccos (4 m x 1,50 m) superposés forment le plancher et reposent simplement- sur la plate-forme. Un toit conique, fait d'une couche de deux petits seccos recouverts de paille, protège l'ensemble du grenier (cf. figure B.1).

Cependant, suite aux effets de la sécheresse, les espèces d'arbres citées plus haut, les tiges d'Andropogon et la paille utilisée pour la toiture sont de plus en plus difficiles à trouver. De plus, une nouvelle réglementation sur la coupe des arbres adoptée par le Burkina Faso en 1985, limité sérieusement l'emploi des pièces de bois habituelles. Cet ensemble de contraintes explique aisément l'apparition d'une évolution des techniques qui consiste à crépir d'argile les parois intérieure et extérieure des greniers en paille (cf. figure B.3).

Par ailleurs, il existe aussi chez les Gourmantché une structure de stockage en banco, recouverte d'un toit en paille et de petite dimension (cf. figure B.4). Ce grenier est destiné à la conservation du grain battu, pour un à deux mois de consommation familiale.

1.2.1.2 Plateau Mossi

Les techniques de stockage des Mossi présentent des différences notables selon qu'il s'agit du nord du plateau, dans le Yatenga par exemple, ou du centre et du centre-est.

Dans ces dernières zones, le stockage est fait principalement sous forme de grain battu, dans des greniers en paille ou en banco, comme chez les Gourmantché. Mais là aussi, les effets de la sécheresse se sont: faits sentir et se reflètent dans les modifications des techniques de construction des greniers. En l'absence de bois résistant, on observe en effet une utilisation de plus en fréquente de grosses pierres pour remplacer les poteaux de support: des plates-formes (cf. figure B.1).

Dans le Yatenga, en revanche, le stockage principal du mil et du sorgho est fait en épis à l'intérieur de greniers en secco, ou également dans de grands greniers (8 à 10 m3) en briques de banco.

1.2.1.3 Zone Gourounsi

Selon les villageois interrogés, les greniers Gourounsi-Lela étaient autrefois (deux ou trois générations antérieures) entièrement construits en matériaux végétaux, comme ceux des Mossi. Mais la raréfaction progressive de ces matériaux a conduit les paysans à adopter le grenier en banco.

Ce grenier (figure B.7), qui ressemble beaucoup à ceux des ethnies Dogon et Bwaba, consiste en une plate-forme, faite de trois poutres maîtresses et d'un plancher de traverses en bois, le tout reposant sur six ou neuf grosses pierres.

Naguère, une herbe spéciale contre les termites, appelée "herbe du buffle" ou gononsolo, était- étalée sur cette plate-forme et recevait la première couche de banco formant le fond du grenier. De nos jours, cette herbe, devenue introuvable du fait de l'extension des surfaces cultivées, est remplacée par des tiges de mil, moins résistantes.

Le corps du grenier, de forme trapézoïdale, est construit en mottes de banco mélangé à de la paille. Il est couvert d'un toit conique, fait de couches de secco et de paille d'Imperata cylindrica.

Le crépissage intérieur et extérieur du grenier est soigneusement renouvelé chaque année par les femmes, qui complètent cette opération par un enduit finement poli. Le stockage des céréales y est fait sous forme d'épis.

1.2.1.4 Zone Dagari et Lobi

L'habitat de la grande famille Dagari, souvent isolé en plein champ, ressemble à une forteresse carrée en banco aux dimensions imposantes. Une seule porte permet l'accès à la cour intérieure, complètement entourée par les pièces d'habitation. Le grenier, invisible de l'extérieur comme de l'intérieur de la cour, fait partie intégrante de cet ensemble architectural. Il occupe totalement une pièce, avec une seule ouverture au sommet, débouchant: sur la terrasse et couverte d'un petit chapeau de paille. Ainsi protégé des intempéries, le grenier peut durer, selon les villageois Dagari, plus de 50 ans (cf. figure B.8).

Le corps du grenier, en forme de grande jarre (6 à 8 m3), repose sur une plate-forme semblable à celle du grenier Gourounsi décrit ci-dessus. Il est fabriqué avec un mortier d'argile, tiré du bord des marigots et mélangé à une herbe graminée finement hachée. Les parois sont construites en mortes de banco, par couches de 5 à 10 cm de hauteur.

Le stockage du mil y est fait sous forme d'épis hachés en menus morceaux, et celui du sorgho, sous forme de grain battu et non vanné. Ces techniques permettent de stocker une plus grande quantité de produits, tout en réduisant sensiblement les infestations d'insectes.

Les familles Lobi rencontrées par le projet dans la zone où prédomine l'ethnie Dagari pratiquent des techniques de stockage très semblables à celles qui viennent d'être présentées.

1.2.2 Dégâts et pertes

1.2.2.1 Causés par les insectes

Le sorgho blanc est le produit qui se conserve le plus facilement. Selon les producteurs, quel que soit le type de structure dans laquelle il est stocké, on peut le garder deux à trois ans sans dégâts notables. En revanche, le mil et le sorgho rouge 1/ se conservent moins bien et sont généralement infestés par les insectes au bout d'un an.

Tant dans les greniers en paille que dans ceux en banco, Corcyra cephalonica et Rhizopertha dominica sont les deux ravageurs qui font le plus de dégâts sur le mil et: sur le sorgho. Au bout de cinq à six mois de stockage (soit à partir d'avril ou mai), leur présence devient nettement visible, sauf dans le cas où le stock a fait l'objet d'un traitement spécial. Ainsi par exemple, selon les estimations faites par les paysans, les pertes seraient de 10% sur le mil et de 6% sur le sorgho blanc au bout de 12 mois de conservation. Dans le cas du niébé, il faut nécessairement procéder à un traitement pour conserver les grains plus de deux mois. Un mélange de cendre chaude ou froide permet, toujours selon les villageois, de limiter les pertes à 4-5% en un an de stockage.

Quant au riz en paddy, sa conservation ne pose aucun problème et il n'y a pratiquement pas de pertes au bout d'un ou même de deux ans.

1.2.2.2 Causés par les rongeurs et les termites

Les rongeurs et les termites causent surtout des dégâts dans les greniers végétaux. Les épis rongés par les souris, que les villageois peuvent remarquer au moment des prélèvements pour la consommation, sont un signe évident de leur présence dans le grenier tout au long de l'année.

Le problème des termites, quant à lui, s'est aggravé depuis la raréfaction, sinon la disparition des meilleurs bois de construction, contraignant les villageois à remplacer ceux-ci par des matériaux moins résistants.

En revanche, pour les greniers en banco des diverses zones visitées, aucune attaque de rongeurs ou de termites n'a été signalée.

1.2.3 Techniques de préservation

1.2.3.1 Techniques traditionnelles

Comme méthode de lutte préventive et parfois curative, les paysans de diverses provinces du Burkina Faso utilisent des produits naturels d'origine végétale contre les insectes des stocks, mais aussi pour protéger la structure des greniers contre les termites. Il s'agit principalement des feuilles, mais aussi des fleurs et des fruits de plantes qui poussent à l'état- sauvage en brousse.

Parmi les plantes dont l'utilisation, actuelle ou passée, a été le plus souvent relevée, il faut mentionner spécialement Hyptis spicigera 1/ qui est employée surtout: pour préserver les légumineuses en gousse. Une autre plante aux propriétés intéressantes pour la conservation a été également recensée, sans qu'on puisse malheureusement identifier son nom scientifique. Il s'agit du Nakpaw, comme l'appellent les Dagari. Les paysans en font sécher les feuilles et les tiges pour les piler; la poudre (matière active) ainsi obtenue est alors mélangée à de la cendre qui sert de support. Le traitement se fait par couches successives appliquées uniquement sur le sorgho, le riz et l'arachide. En effet, selon les villageois Dagari, le Nakpaw aurait des propriétés enivrantes, voire paralysantes. C'est pourquoi il n'est pas utilisé sur le mil, dont la mouture se fait sans décorticage préalable, contrairement au sorgho, au riz et à l'arachide. Sur le mais, le produit: est simplement appliqué à la base et à la surface du stock.

Pour les paysans Dagari, le Nakpaw serait plus efficace contre les insectes que l'Actellic, grâce en particulier à son odeur qui, dans le grenier, persisterait pendant trois ans. Cette affirmation, qui ne manque pas d'intérêt, mériterait d'être vérifiée.

Le Nakpaw, dont les fruits rappellent les gousses de soja, est également connu des Lobi, qui l'appellent Tingtingkou, c'est-à-dire "plante qui tue les mouches". Ils disent l'utiliser pour soigner les plaies d'animaux d'élevage, mais non pour la conservation des céréales.

Les Gourounsi Lela de Réo utilisent les fleurs de Cymbopogon giganteus appelé Solo pour lutter contre les insectes. Mais depuis l'apparition des insecticides chimiques, qui coïncide avec la raréfaction du Solo, cette technique tend à disparaître.

On doit également signaler la méthode de conservation des grains de niébé dans des jarres ou des canaris en argile, fermés de façon étanche. Des produits pulvérulents tels que la cendre chaude ou froide sont utilisés pour remplir le maximum d'espace interstitiel et donc occuper le vide qui, autrement, serait pris par l'air. Les déplacements des insectes sont par là même ralentis, et leur asphyxie, accélérée.

Contre les attaques des termites, il faut aussi mentionner l'application, sur les poteaux et traverses des greniers Mossi et Gourmantché, de l'huile de karité, liquide extrait de la fabrication du beurre végétal du même nom.

Au cours des années 70, une campagne nationale, utilisant les moyens radiophoniques et les services d'encadrement, a été menée, visant à sensibiliser les agriculteurs et à vulgariser l'utilisation de produits chimiques, en particulier celle du gamma-grain, que le Service de la protection des végétaux mettait à la disposition des Organismes régionaux de développement (ORD) en vue de leur distribution.

Cet effort de sensibilisation et de formation explique la maîtrise actuelle, par tous les villageois rencontrés, de l'emploi des insecticides chimiques en poudre.

Depuis le début des années 80, le gamma-grain a été remplacé par le Pirimiphos-méthyl (Actellic), qui était alors largement disponible au niveau des ORD. Malheureusement, l'approvisionnement irrégulier de ces organismes en Actellic, s'ajoutant à la vente libre de nombreux autres produits pesticides sur les marchés locaux, conduit les paysans à employer n'importe quelle poudre, telle que le HCH, sur leurs stocks vivriers.

2. Conclusions

2.1 Récolte et séchage

Le préstockage des épis de mil et de sorgho au champ entraîne des pertes, dues principalement aux rongeurs, mais aussi parfois aux animaux d'élevage. Ce délai avant la rentrée de la récolte, qui peut atteindre une dizaine de jours, pourrait être abrégé si les paysans Gourmantché disposaient de meilleurs moyens de transport, des charrettes attelées, par exemple, et des matériaux plus résistants, notamment contre les attaques de termites, pour construire leurs greniers.

Chez les Mossi des zones centre et centre-est, ces délais sont encore plus longs (deux à trois mois) car ils doivent préparer longuement l'opération de battage qui s'accompagne de tout un cérémonial traditionnel, et attendre la période de l'harmattan pour effectuer le vannage.

Les Dagari et les Lobi, en revanche, ne connaissent pas ces contraintes. Dès après la récolte, en effet, ils transportent les récoltes sur les terrasses d'habitation, lieu privilégié pour le séchage et le conditionnement des denrées avant le stockage, à l'abri de toutes déprédations.

2.2 Stockage

2.2.1 Structures et techniques de stockage

Les effets d'une sécheresse prolongée ont une incidence grandissante sur la construction des greniers en matériaux végétaux. On le remarque, d'une part par l'utilisation de matériaux moins résistants, d'autre part par des modifications sensibles des techniques de construction (crépissage intérieur et extérieur des greniers en paille, emploi de grosses pierres à la place des poteaux soutenant les plates-formes). Il s'agit: là d'une évolution vers le grenier en banco, qui s'est déjà produite depuis un certain temps dans la région de Réo, chez les Gourounsi-Lela, et qui a déjà fait son apparition dans le Yatenga où des villageois utilisent maintenant- le grenier de banco. Il est fort probable que ces transformations continueront de se propager. Mais, dans toutes les zones où l'adoption du grenier en banco s'explique par les effets de la sécheresse, la recherche du bon bois pour les poutres et- poutrelles des plates-formes restera toujours un obstacle.

Seules les zones plus humides du sud du pays semblent peu affectées jusqu'ici par cette contrainte.

2.2.2 Déprédations et techniques de préservation

Le mil, qui est l'une des denrées de base de l'alimentation des populations, fait l'objet d'importances infestations d'insectes à partir du septième mois de stockage. Au cours des dernières années, où la récolte suffisait à peine à couvrir les besoins d'une année de consommation, ces infestations n'avaient pas le temps de faire de gros ravages. Mais, en année de production normale (cas de l'année 1985-86), les pertes en cours de stockage peuvent être beaucoup plus graves. Cela s'explique notamment par le fait que les plantes, qui poussaient à l'état sauvage, utilisées traditionnel lement pour la préservation des récoltes, telles que Cymbopogon gisant eus, Hyptis spicigera et le Nakpaw, ont été délaissées par les paysans au profit des insecticides chimiques. On peut d'ailleurs se demander si ces plantes, qui n'ont jamais été cultivées, sont encore disponibles en quantité suffisante. Cela s'explique aussi par le fait que l'Actellic en poudre, maintenant recommandé par le Service de la protection des végétaux, n'est pas toujours disponible au niveau des ORD.

Cet ensemble de contraintes, qui concerne le stockage de toutes les céréales vivrières, sauf le riz, conduit les paysans à acheter n'importe quel produit pesticide, en vente libre sur les marchés locaux.

3. Recommandations

3.1 Evaluation de certaines structures traditionnelles

La construction des greniers traditionnels, enmatériaux végétaux, utilisés par les Mossi et les Gourmantché, est maintenant confrontée à des contraintes liées à la raréfaction, parfois même à la disparition, des bois résistants aux termites. Les villageois cherchant des solutions de remplacement, il est nécessaire de les assister dans cette voie par l'expérimentation, et, si nécessaire, par l'amélioration d'autres modèles de greniers traditionnels, aux conceptions et performances intéressantes, tels que les greniers des Gourounsi-Lela, qui pourraient éventuellement constituer une bonne solution.

3.2 Inventaire et évaluation des ingrédients naturels de préservation

Les anciennes techniques de conservation qui permettaient le stockage pluri-annuel des céréales faisaient appel à diverses plantes et ingrédients naturels pour préserver les récoltes. Parmi ces ingrédients, on peut citer le Nakpaw, Hyptis spicigera et Cymbopogon giganteus, connus et parfois utilisés par certaines ethnies.

Il est vivement recommandé de procéder à un inventaire systématique de toutes les plantes et autres ingrédients ayant des propriétés insecticides et/ ou insectifuges, et d'évaluer leur efficacité en la comparant à celle d'insecticides chimiques tels que l'Actellic. Les ingrédients les plus performants devraient faire l'objet d'une production en vue de leur diffusion.

3.3 Nécessité d'une campagne de sensibilisation et d'une législation sur les produits phytosanitaires

La campagne nationale de sensibilisation sur les produits pesticides, menée durant les années 70, avait permis aux agriculteurs de maîtriser l'utilisation des insecticides que les ORD distribuaient pour la protection des stock villageois. Il s'agissait notamment du gamma-grain qui, plus tard, a été remplacé par l'Actellic. Mais, suite à des ruptures dans l'approvisionnement en Actellic, de nombreux paysans se sont orientés vers des produits très toxiques tel le HCH, en vente libre sur les petits marchés.

Il est donc recommandé:

Figure B.1: Grenier traditionnel chez les Gourmantché (Burkina Faso). Noter l'absence de poteaux, ici remplacés par de grosses pierres soutenant la plateforme.

Figure B.2: Ossature d'un grenier traditionnel gourmantché.1

Figure B.3: Grenier en matériaux végétaux aux parois intérieure et extérieure crépies d'argile.

Figure B.4: Petit grenier extérieur pour la conservation des céréales en grain. Forme cylindrique et se terminant par un dôme ouvert au sommet.

Figure B.5: Autre modification dans la construction du grenier traditionnel chez les Mossi et les Gourmantché: plate-forme faite simplement de grosses pierres.

Figure B.6: Evolution vers l'utilisation du grenier en banco chez les Gourmantché et les Mossi. Tendance nouvellement observée.

Figure B.7: Grenier traditionnel chez les Gourounsi (Réo, Burkina Faso). A remarquer la finesse du crépissage extérieur.

Figure B.8: Grenier traditionnel chez les Dagari (Burkina Faso). Le grenier, toujours installé à l'intérieur d'une pièce d'habitation, a une seule ouverture débouchant sur une terrasse ou s'effectue l'essentiel du séchage et du conditionnement des récoltes.


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